mercredi 9 décembre 2009

Sang et larmes



"Inyenzy"
Claquement sec, obscène.
"Inyenzy, cancrelats; vous êtes tous des cadavres!"
Le major tourne entre ses hommes, les excite, bombe le torse, frappe l'un, frappe l'autre, aboie, éructe.
"Inyenzy, vous allez tous crever" rajoute le major, puis il se tourne vers un des hinterhamwés armé d'une machette et hurle:
"Séraphin crève ce pourceau, crève ce géniteur et sa descendance tutsie. Crevez les tous, ces porcs, ces insectes!"
Le gamin excité par la bière de banane et les ordres du major frappe le père et lui fracasse le visage.
Celui-ci s'écroule tué sur le coup.
Il ne souffre déjà plus.
Les coups pleuvent sur la famille terrorisée. Les chairs sont tranchées, les corps s'effondrent dans un silence glacé. Ils savent qu'ils vont mourir.
La mère est atteinte à son tour, tourne la tête vers une de ses filles indemnes car sans doute désirée par ces brutes furieuses, puis voit le potager familial et crie dans un dernier souffle:
"Olympe, Olympe, pense a arroser les légumes ce soir"
La poussière de latérite pique aux yeux.
Derniers cris, derniers râles.

Opprobre à un certain juge qui n'instruit qu'à charge.

(c) Ph Vdb

dimanche 6 décembre 2009

Chienne de guerre



Au calme du bivouac
La mascotte aimée des troupes
Des obus, suit un massacre
L'éclat d'acier transperce la peau
Combien de Bucéphale périrent?
De cerbères aux chants des mitrailleuses
Tirent la langue et fuient

Déchirées les gueules cassées
Aux vapeurs d'hypérite
Craquement de la casemate
Les corps déchirés, la chair pendante
Lavée du sang des innocences
Vingt ans dans les tranchées
Morts pour la Patrie

D'un Jupiter aux sanglants éclairs
De l'Olympe, des gorges tranchées
D'un dernier râle d'agonisant
Ils crient une dernière fois maman
D'un aboiement lointain et faible
Une caresse, une chaleur
L'animal est là, tristement sacrifié

Hommage à nos "poilus inconnus" et à l'exposition "chienne de guerre" au Musée Royal de l'Armée à Bruxelles jusqu'au 11 avril 2010

(c) Ph Vdb


 



mardi 1 décembre 2009

Dans le cochon tout est bon



Oreilles de porc à la Sainte-Menehould

Pour cuire les oreilles mettez dans une marmite de l'eau en quantité suffisante; ajoutez-y du thym, feuilles de laurier, trois ou quatre clous de girofle, une gousse d'ail, un gros oignon. Faites bouillir l'eau, mettez-y les oreilles de porc bien nettoyées; laissez les cuire à petit feu jusqu'à ce qu'elles soient bien tendres. Laissez refroidir dans leur cuisson, assez pour que vous puissiez les retirer avec la main.
Etant entièrement refroidies, poivrez-les, trempez-les dans du beurre à peine fondu, de là dans la mie de pain blanc. Au moment de servir, faites-les griller ou non et servir très chaud.
On peut faire cuire les oreilles aussi dans la cuisson qui a servi pour le fromage de cochon; c'est en faisant cuire plusieurs parties du porc dans la même cuisson que l'on obtient un bouillon assez fort et assez collé pour faire de la gelée; comme le liquide doit séjourner quelques temps dans la marmite, nous vous recommandons que cette marmite soit de fer et fraîchement étamée: c'est plus sûr et plus propre.

Peut être servi avec une petite sauce piquante aux échalottes

1915, "Le livre de la fine et de la grosse charcuterie" par Cauderlier aux éditions AD Hoste